DALE CARPENTER › boys like boys like girl do.

PAPA & MAMAN : papa et maman, ils sont partis. t'avais quatre ans. ils sont partis et ils sont jamais revenus. tu les as jamais revus. à l'époque, on t'a dit qu'ils étaient partis visiter les étoiles. et tu ne comprenais pas. non. t'étais trop jeune. tu demandais sans cesse à ta tante quand est-ce que ta maman allait revenir. et tu ne comprenais pas pourquoi parfois, elle pleurait, en te disant qu'elle ne savait pas quand elle allait revenir. et avec le temps, t'as comprit. t'étais assez grand pour comprendre. et tu as pleuré pour la première fois. tu avais douze ans. les jambes tremblantes devant le marbre blanc, devant les prénoms de tes parents tatoués sur la pierre froide. tu es tombé à genoux sur les graviers et tu as pleuré de longues heures sans bouger. comprenant qu'ils ne reviendraient jamais.

HOMOSEXUALITÉ & CARL : ça fait déjà cinq ans. que tu le caches. que tu le dissimules. parce que tu en as honte. tout simplement. t'avais dix-huit ans. à l'époque. quand tu l'as su. une soirée. un bar. un mec qui t'aborde. un peu d'alcool dans le sang. un baiser. deux. plusieurs baisers. et une nuit. une seul. des gémissements, des mains s'égarant sur un corps masculin. tu te souviens de cette nuit. malgré l'alcool. elle reste ancrée en toi. et t'as envie de l'oublier parfois, parce que tu n'assumes pas. non. tu n'arrives pas à le dire. quelques mots, bien trop compliqués à prononcer. j'aime les hommes. tu peux pas. ça bloque. parce que tu as peur. peur du regard. peur du jugement. peur des insultes. peur de la réaction de carl. carl, c'est ton meilleur ami. tu l'as rencontré il y a quelque temps, dans un bar. il visait une fille, il pensait que tu t'intéressais à la même fille, mais toi t'étais plus attiré par son pote. gay. pour une fois que tu te décidais à t'intéresser aux hommes. et ce soir-là, t'as rencontré carl. t'arrives pas trop à savoir pourquoi, mais vous avez réussi à devenir proches. trop proche. et tu t'es attaché à lui. trop. beaucoup trop. t'es tombé amoureux. comme un con. ton regard sur son corps. l'envie de l'embrasser, de le toucher, tout le temps. l'envie d'être encore plus proche de lui. mais tu fais rien. rien du tout. parce que tu l'entends souvent, cracher sur sa mère, cracher sur les homosexuels. alors tu te tais. tu restes silencieux. tu l'observes de loin. tu fantasmes.

TATOUAGES : t'en as plusieurs. sur les deux bras. ils ont tous une signification bien particulière. il y en a deux qui sont dédiés à tes parents. tu n'hésites pas à le dire. à l'expliquer. pourquoi. comment. le reste, t'expliques pas. y'a que toi qui sais. t'as pas envie d'en parler, t'as pas envie que quiconque soit au courant de pourquoi tu as choisi d'infiltrer l'encre dans ta peau une nouvelle fois. c'est une partie de toi que tu veux pas qu'on découvre, ton jardin secret.